ÉCONOMIE | Lettre de la Gestion Privée Q2 2020

Alors que l’économie mondiale montrait des signes d’amélioration, les incertitudes relatives à l’épidémie de coronavirus et la mise en place de mesures coercitives pour limiter sa propagation ont fait chuter l’activité et les marchés au premier trimestre. Face à la violence du choc économique et financier, les pouvoirs publics et les banques centrales ont fait preuve d’une grande réactivité pour sauvegarder l’appareil productif. Une fois que l’épidémie sera contrôlée, la fin du confinement devrait permettre une reprise de l’activité sur une base très affaiblie.

Un choc d’activité de grande ampleur

La propagation de l’épidémie de coronavirus en dehors de Chine a entraîné la mise en place de mesures coercitives sur une grande partie de la planète. Les déplacements de population ont été limités et de nombreux secteurs ont été contraints de cesser leur activité. Les statistiques économiques commencent à refléter l’effet de ces mesures.

Dans la zone euro, le PIB a chuté de 14,4% en rythme annualisé au premier trimestre. Il baisse de 21,4% en France, de 17,7% en Italie et de 19,4% en Espagne, impliquant une baisse d’environ 8% en Allemagne. Les enquêtes PMI (1) se sont effondrées en mars et en avril pour atteindre des plus bas historiques. Les enquêtes PMI ont également chuté au Royaume-Uni et au Japon.

Aux Etats-Unis, le PIB s’est contracté de 4,8% en rythme annualisé au premier trimestre. La consommation des ménages a lourdement chuté, dans les biens durables et dans les services. L’investissement non résidentiel et le stockage ont également pesé. Plusieurs millions de personnes se sont inscrites au chômage en l’espace de quelques semaines seulement.

En Chine, le PIB s’est contracté de 33,8% en rythme annualisé au premier trimestre. Cela masque toutefois un fort rebond de l’activité en mars grâce au déconfinement. Les enquêtes PMI d’avril confirment la reprise mais les nouvelles commandes à l’exportation chutent.

Un effondrement des marchés actions

Les marchés actions avaient plutôt bien débuté l’année 2020, portés par la réduction des tensions commerciales sino-américaines et les premiers signes de reprise économique. Le sentiment a commencé à s’effriter fin janvier 2020, à la suite de la mise en place de mesures de confinement en Chine. Les marchés ont ensuite chuté à partir de fin février, quand l’épidémie a commencé à se propager en dehors de Chine. Le mouvement a été d’une violence inouïe et très rapide, l’Eurostoxx cédant près de 40% en un mois à peine. Les marchés mondiaux ont finalement atteint un point bas mi-mars, aidés par les mesures de soutien prises par les pouvoirs publics et les actions des banques centrales. En fin de compte, sur l’ensemble du premier trimestre, l’Eurostoxx a perdu 24,7%, l’indice MSCI en dollars des actions émergentes 23,6%, le S&P 500 19,6% et le Topix 17,5%, le tout dans leurs devises respectives et dividendes réinvestis. Les multiples de résultats se sont effondrés mais s’appliquent à des prévisions qui ne reflètent pas encore le choc économique en cours.

Des banques centrales à la rescousse

Les taux d’intérêt ont fortement baissé, surtout aux Etats-Unis. Le taux à 10 ans du Trésor américain est passé de 1,92% à 0,67% avec un point bas historique à 0,54% le 10 mars. Le taux à 10 ans de l’Etat allemand a baissé dans une moindre mesure, passant de -0,18% à -0,47%. Les marchés du crédit se sont fortement dégradés. Pour éviter un assèchement de la liquidité sur les marchés et un resserrement du crédit bancaire, les banques centrales ont multiplié les déclarations. La Fed a annoncé, entres autres, une baisse de son taux directeur de 150 points de base, à 0%-0,25%, un programme d’achats illimités de bons du Trésor et un programme massif de prêts aux entreprises et aux collectivités locales. De son côté, la BCE a annoncé une augmentation de 120 Mds d’euros de son programme d’achats d’actifs, la création d’un nouveau programme d’achats de 750 Mds d’euros et une augmentation potentielle des prêts effectués dans le cadre du TLTRO (2) avec des conditions plus avantageuses pour les banques. La Banque d’Angleterre a notamment baissé son taux directeur, annoncé un programme d’achats de titres de 200 Mds de livres et ouvert la voie à un financement direct du déficit public. La Banque du Japon a augmenté ses achats d’actifs.

Une grande volatilité sur le marché des changes

L’euro s’est déprécié de 1,6% face au dollar au premier trimestre mais cette variation masque des mouvements de grande ampleur. L’euro s’est dans un premier temps déprécié pour atteindre 1,08 le 20 février avant de remonter violement pour toucher un sommet à 1,14 le 9 mars. Il a ensuite rechuté jusqu’à atteindre un point bas à 1,07 le 19 mars pour finalement s’établir à 1,10 fin mars contre 1,12 fin décembre.

Vers une reprise de l’activité au second semestre 

Les mesures de confinement et l’arrêt d’activité dans différents secteurs vont peser très lourdement sur le PIB des mois à venir. Cette mise à l’arrêt de l’économie entraîne des données macroéconomiques extraordinairement mauvaises mais qui ne reflètent rien d’autre que les conséquences du confinement. Contrairement à 2009, la réaction des politiques monétaires et budgétaires est actuellement très rapide et massive. Cela devrait limiter la destruction des capacités de production. D’autres mesures viendront ensuite pour soutenir la reprise économique. Le redémarrage de l’activité sera évidemment lié à l’évolution de l’épidémie sur laquelle aucun scénario ne semble faire consensus. Toutefois, si, comme en Chine et en Corée, les mesures de confinement permettent d’endiguer l’épidémie, ce que l’on commence à observer en Europe, la contraction du PIB ne devrait durer que quelques semaines. L’activité devrait redémarrer partiellement le 11 mai en France et une reprise en quelques mois au second semestre demeure le scénario le plus probable. Généralement, les reprises molles se produisent dans des économies qui présentent des déséquilibres et dont le système financier est en mauvais état, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

(1) PMI : les enquêtes PMI (Purshasing Manager Index) sont des indicateurs de confiance qui synthétisent les enquêtes menées auprès des directeurs d’achats d’entreprises. Une valeur supérieure à 50 indique un sentiment positif. Il se décline en 3 sous indices : manufacturier, service ou composite (qui combine les deux).

(2) TLTRO : les TLTRO (Targeted Longer-Term Refinancing Operations) sont des opérations ciblées de prêts à long terme. Le montant maximal que chaque banque peut emprunter auprès de la BCE dépend de l’encours de crédit qu’elle a accordé aux entreprises non-financières et aux ménages (hors prêts immobiliers).

 

L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 6 mai 2020 et est susceptible de changer.

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