Qu’est-ce qu’une bulle ?

Question de la semaine

Le Bitcoin à 50 000 dollars. Tesla qui vaut plus en bourse que l’ensemble des autres constructeurs automobiles. Un indice des entreprises de la technologie multiplié par quatre entre avril 2020 et mi-février 2021. Le cours de Gamestop multiplié par 20 en l’espace de quelques jours en janvier. Autant de signes qui amènent les observateurs des marchés financiers à se poser la question de l’émergence de nouvelles bulles. Mais qu’est-ce qu’une bulle précisément ?

La définition la plus fréquemment reprise est celle de Charles Kindleberger, un économiste spécialiste de ces phénomènes, dont l’Histoire mondiale de la spéculation financière constitue une référence sur le sujet. Selon lui, « une bulle peut être grossièrement définie comme une hausse rapide du prix d’un actif ou d’une absence d’actifs de manière continue, la première hausse générant des anticipations de nouvelles progressions et attirant de nouveaux acheteurs. Ces derniers sont en général des spéculateurs intéressés par les profits liés au trading de l’actif plutôt que par sa capacité à générer des revenus. La hausse est généralement suivie d’un retournement des anticipations et une forte baisse des prix générant souvent des crises financières. »

Aucun actif n’est à l’abri des comportements de bulle. La liste qu’il a établie pour le dictionnaire d’économie de Palgrave est éloquente : matières premières, obligations, actions, immobilier, terrains, avions 747, supertankers, tableaux, bijoux, timbres, pièces, antiquités…

Une bulle se définit donc surtout par un processus. Elle va généralement commencer par une phase d’essor, où une nouvelle technologie ou une évolution du contexte économique vont générer de l’enthousiasme pour un ou plusieurs actifs donnés. Vient ensuite la phase de boom où, par divers mécanismes, la hausse entraîne la hausse. Cette phase va accentuer la couverture médiatique du phénomène et va contribuer à faire rentrer de nouveaux investisseurs sur ces actifs. Cette phase génère une euphorie où les fondamentaux sont totalement passés sous silence et où un discours de nouveau paradigme vient justifier les niveaux extrêmes atteints par le prix des actifs. Par la suite, les anticipations recollent à la réalité et les prix des actifs s’effondrent jusqu’à une phase de rejet où ces prix peuvent baisser en-dessous de la valeur fondamentale de l’actif. Le fait générateur de ce retournement n’est jamais très clair, mais un resserrement des conditions financières joue souvent un rôle important.

Reste que, dans le cas des marchés boursiers, on a pu voir suite à l’effondrement de la bulle internet des années 2000 que certaines sociétés ayant connu ce phénomène sont finalement devenues extrêmement profitables et ont donc constitué des investissements rentables. Avant d’atteindre les niveaux actuels, Amazon avait vu son cours baisser de presque 95% entre fin 1999 et fin 2001. La bulle constitue donc peut-être une étape incontournable des révolutions industrielles. Certains économistes estiment d’ailleurs que l’enthousiasme qu’elles génèrent permet d’augmenter les investissements dans des secteurs ayant besoin de capitaux pour devenir rentables. Si cela est sans doute vrai pour les actions, il n’en est sans doute pas de même pour un actif sans valeur intrinsèque dérivée de flux financiers comme le Bitcoin.

Peut-on se prémunir contre les bulles ? Les flux financiers d’un actif (dividendes, coupons…) constituent un ancrage réel qui finit toujours par s’imposer aux spéculateurs. A contrario, avec des actifs sans flux, la part du rêve est plus importante. Nature humaine, séduction d’une belle histoire, liquidité abondante constituent donc les ingrédients des bulles. Si le dernier dépend notamment de la politique des banques centrales et régulateurs, les investisseurs devront toujours composer avec les deux premiers.

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L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 31 mars 2021 et est susceptible de changer.
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