Point conjoncturel – Octobre 2021

Pas de signe d’apaisement des tensions

Les créations d’emplois étaient en dessous des attentes en septembre, ressortant à +194 000 contre +500 000 attendu, en grande partie du fait des 180 000 emplois en moins dans le secteur de l’éducation. Au niveau du secteur privé, la déception était moindre avec +317 000 emplois créés sur le mois et des révisions en hausse sur les mois précédents, contre des attentes à +450 000. Le taux de chômage a baissé nettement plus que prévu, à 4,8%, en lien avec la baisse du taux de participation de 61,7% à 61,6% et une enquête auprès des ménages plus forte. Le salaire horaire progressait encore nettement sur le mois avec une hausse de +0,6% sur un mois et de +4,6% sur un an.  Quasiment tous les secteurs affichent une croissance des salaires supérieure à la norme. Globalement, ce rapport sur l’emploi ne va pas dans le sens d’une baisse des tensions sur le marché du travail. La dégradation de la situation épidémique en septembre a pu jouer et il faudra peut-être plusieurs mois pour mesurer l’impact de l’arrêt des bonifications d’indemnisation chômage de début septembre.

Les chiffres d’inflation de septembre ne montraient pas non plus d’apaisement des tensions sur les prix. A première vue, le rythme de hausse des prix à nettement ralenti depuis trois mois, l’indice hors énergie et alimentation progressant de +0,2% sur le mois, après +0,1% en août et +0,3% en juillet, contre une hausse moyenne de +0,8% entre avril et juin. Le ralentissement est toutefois très lié à la normalisation des prix des biens et services qui sont les plus sensibles à la pandémie (voitures, hôtellerie, services de transport) et qui avaient fortement augmenté. Si l’on exclut ces catégories, l’inflation core est similaire à ce que l’on pouvait observer au printemps. On observe également une poursuite de l’accélération du coût du logement, une composante plus structurelle et qui pourrait amener des tensions inflationnistes plus durables.

Les indices ISM se maintiennent sur des niveaux élevés avec des nouvelles commandes qui sont très bien orientées, signe que la demande reste forte. La composante des délais de livraison augmente à nouveau, illustrant des problèmes d’approvisionnement et de logistique qui pèsent sur l’activité, en particulier dans le secteur de l’automobile. Cela continue de peser sur les ventes de voitures qui ont reculé de 6,7% en septembre après une baisse de 11,5% en août. La baisse des ventes de voitures au troisième trimestre devrait nettement peser sur la croissance.

Dans ce contexte, la Fed a ouvert la voie à une réduction de ses achats d’actifs en novembre. Les membres du comité de politique monétaire ont également revu leurs prévisions de taux d’intérêt à la hausse, à une demie hausse de 25 points de base l’année prochaine et à 3 hausses supplémentaires en 2023.

[1] ISM : publié chaque mois par l’Institute for Supply Management, cet indice est séparé en deux grandes familles : L’ISM manufacturier, reflétant la santé du secteur aux USA et l’ISM services, plus spécifique aux activités tertiaires.

[2] PIB : Produit Intérieur Brut, indicateur des richesses produites par un pays. Indicateur économique principal de mesure de la production économique réalisée à l’intérieur d’un pays donné

[3] Fed : La réserve fédérale des Etats-Unis, soit la banque centrale des Etats-Unis.

 

 

Modération de l’activité

Le PMI composite a continué de se replier en octobre avec une baisse de 1,9 points sur le mois à 54,3, son plus bas niveau depuis six mois. Le PMI manufacturier n’a baissé que de 0,1 point, à 58,5, mais la composante relative à la production et qui est utilisée pour calculer le PMI composite, a cédé 2,4 point pour atteindre un plus bas depuis seize mois à 53,2. L’intensification des problèmes d’approvisionnement freine la production et les délais de livraison s’allongent à nouveau pour revenir sur leurs plus hauts. Markit indique que la forte chute de la production automobile s’est poursuivie en octobre et les problèmes du secteur automobile sont également visibles dans les données d’activité. La production automobile dans la zone euro a baissé de 10,5% sur le seul mois d’août et se situe environ 30% en dessous de son niveau d’avant crise. On observe également une diminution des nouvelles immatriculations qui ont reculé de 7,0% sur l’ensemble du troisième trimestre.

En parallèle, le PMI des services s’est replié de 56,4 à 54,7. L’effet de la levée des restrictions sanitaires s’estompe progressivement tandis que la recrudescence du virus, notamment en Allemagne, suscite de nouvelles inquiétudes qui se répercuteraient sur certains secteurs tels que les voyages et le tourisme. Les composantes emplois restent bien orientées, surtout dans le secteur des services, et la baisse du taux de chômage se poursuit. A 7,5% en août dans la zone euro, il n’est plus qu’à 0,1 point du niveau de février 2020. Le détail des enquêtes PMI montre également une forte hausse des composantes prix qui atteignent des niveaux records, aussi bien en amont qu’en aval, faisant craindre un renforcement des pressions inflationnistes. Les chiffres avancés d’inflation pour le mois de septembre font état d’une modération, après trois mois relativement forts, mais il faudra vérifier l’impact de la hausse des prix de l’énergie dans les prochains mois.

Les élections allemandes n’ont pas donné de majorité claire, ouvrant une période de négociation entre les partis pour constituer un gouvernement. Le SPD, les Verts et les Libéraux ont annoncé être parvenus à un accord préliminaire qui a abouti à la publication d’un document de 12 pages résumant les politiques sur lesquelles ils ont pu se mettre d’accord et qui constituera désormais la base des négociations officielles. Le SPD a obtenu un engagement à augmenter le salaire minimum, les Verts une série de mesures environnementales pour lutter contre le changement climatique et le FDP a réussi à obtenir l’engagement qu’il n’y aura pas de hausses d’impôts ni d’assouplissement des règles freinant la croissance de la dette.

 

[1]PMI : les indices PMI sont des indicateurs de confiance qui synthétisent les résultats des enquêtes menées auprès des directeurs d’achats des entreprises. Une valeur supérieure à 50 indique un sentiment positif dans le secteur concerné. Il se décline en 3 sous indices : Manufacturier, Service ou Composite (qui combine les deux).

[2]SPD : Le Parti social-démocrate d’Allemagne, qui a été fondé en 1875, est le plus vieux parti politique d’Allemagne. C’est le seul des grands partis actuels de la République fédérale d’Allemagne qui existait sous une forme comparable avant la Seconde Guerre mondiale.

[3]FDP : Le Parti libéral-démocrate est un parti politique libéral allemand créé en 1948. Il défend des politiques combinant la défense des libertés fondamentales et du libre-échange avec certains éléments de l’État-providence allemand

 

Un ralentissement sous contrôle ?

La croissance chinoise a ralenti plus qu’attendu au troisième trimestre pour s’établir à +0,2% en glissement trimestriel, après +1,2% au deuxième trimestre, faisant passer le glissement annuel de +7,9% à +4,9%. La consommation et le secteur des services ont été pénalisées par le renforcement des restrictions sanitaires en juillet et en août avant de rebondir en septembre, quand les restrictions ont été assouplies. Si l’on compare le niveau des ventes au détail en septembre 2021 avec celui de septembre 2019, pour corriger les distorsions liées aux effets de base, celles-ci affichent une hausse annualisée de +3,8%, contre un rythme proche de +8% en 2019. La croissance a également été freinée par le secteur de l’immobilier et les données de septembre montraient une poursuite de cette tendance. Par rapport à 2019 et en rythme annualisé, l’investissement en immobilier a ralenti de +5,9% à +4,0%, les ventes de logements de -2,8% à -4,8% et les mises en chantiers de -7,7% à -7,9%. Les prix de l’immobilier neuf dans 70 villes ont baissé de 0,1% sur le mois, la première baisse depuis six ans, amenant le glissement annuel à +3,3%.

Le ralentissement du secteur de l’immobilier était un objectif du gouvernement qui a nettement renforcé les mesures prudentielles depuis un an. Ces mesures limitent la croissance de l’endettement des promoteurs et imposent aux banques de limiter leur exposition à ce secteur, ce qui entraîne des problèmes de liquidité pour les promoteurs aux fondamentaux dégradés, comme Evergrande. Tout l’enjeu pour le gouvernement est maintenant d’éviter un ralentissement brutal du secteur de l’immobilier qui représente environ un quart du PIB au sens large, sans pour autant apporter un soutien immédiat aux promoteurs en difficulté, ce qui serait contradictoire avec la campagne d’assainissement du secteur de l’immobilier. Pour l’instant, les autorités ont surtout maintenu des conditions de liquidité favorables, afin d’éviter un assèchement du crédit. Le régulateur a également demandé aux banques d’accélérer le processus d’approbation des crédits hypothécaires pour soutenir les ventes, tout en ouvrant la voie à des émissions de RMBS, pour libérer des quotas de prêts.

 

[1]PIB : Produit Intérieur Brut, indicateur des richesses produites par un pays. Indicateur économique principal de mesure de la production économique réalisée à l’intérieur d’un pays donné
[2]RMBS (Residential Mortgage Backed Security) est un produit financier issu de la titrisation de crédits hypothécaires résidentiels. Il permet aux établissements financiers de s’en décharger auprès d’autres établissements, éliminant ainsi le risque de non remboursement adossé à ces prêts.

 

Voir aussi : https://latribune.lazardfreresgestion.fr/point-conjoncturel-juillet-2021/

L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 26 octobre 2021 et est susceptible de changer.

 

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