Point conjoncturel – Décembre 2020

Rebond des enquêtes

L’estimation préliminaire des enquêtes PMI pour le mois de décembre montre un net rebond de l’activité la zone euro. Le PMI composite passe de 45,3 à 49,8 pour revenir sur un niveau proche de celui qui prévalait en octobre, avant la forte baisse de novembre. Le PMI des services passe de 41,7 à 47,3 et le PMI manufacturier de 53,8 à 55,5, un plus haut depuis deux ans et demi. Ce rebond suggère que le point bas sur l’activité est dépassé mais plusieurs éléments amènent à relativiser le mouvement.

D’une part, l’évolution des enquêtes PMI en novembre et en décembre reflète surtout l’évolution des mesures de restrictions sanitaires. D’autre part, il est difficile de relier les enquêtes PMI à un niveau d’activité. Le fait que la baisse de novembre ait été comblée ne signifie pas que le PIB soit revenu à son niveau d’octobre. Cela pourrait prendre quelques mois. D’après les dernières estimations de l’INSEE, l’activité en France reviendrait à son niveau d’octobre en mars 2021. Enfin, l’enquête PMI de décembre porte sur la période allant du 4 au 15 décembre, c’est à dire avant la mise en place de nouvelles restrictions en Allemagne et aux Pays-Bas (fermeture des commerces non-essentiels et des écoles). Il est donc probable que l’estimation finale soit revue à la baisse.

Le point positif est que l’indice mesurant les perspectives à douze mois continue de s’améliorer, les bonnes nouvelles sur les vaccins laissant attendre un reflux de l’épidémie et une levée des restrictions qui pèsent sur l’économie. En attendant la constitution d’une immunité de groupe, il faudra néanmoins continuer de surveiller la trajectoire de l’épidémie. Un pic est dépassé dans la zone euro mais le nombre de nouveaux cas ne baisse plus voire remonte dans certains pays, ce qui freine le processus de réouverture des économies.

Pour préserver des conditions de financements favorables et aider la reprise, la BCE a annoncé un recalibrage de sa politique monétaire, sans surprise. Elle a augmenté de 500 milliards d’euros l’enveloppe consacrée au programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP), à 1850 milliards d’euros, et a étendu sa durée jusqu’en mars 2022, en précisant que ce programme ne serait pas obligatoirement utilisé dans son intégralité. La BCE a également renforcé son soutien aux banques en ajustant les termes de son programme de prêts à long terme à taux négatifs (TLTRO). De nouvelles opérations sont programmées, le montant susceptible d’être d’emprunté est augmenté et la période de taux d’intérêt bonifié appliqué aux opérations de TLTRO a été prolongée d’un an.

PMI : les indices PMI sont des indicateurs de confiance qui synthétisent les résultats des enquêtes menées auprès des directeurs d’achats des entreprises. Une valeur supérieure à 50 indique un sentiment positif dans le secteur concerné. Il se décline en 3 sous indices : Manufacturier, Service ou Composite (qui combine les deux).

PIB : Produit Intérieur Brut, indicateur des richesses produites par un pays.

INSEE : l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques est chargé de la production, de l’analyse et de la publication des statistiques officielles en France.

BCE : Banque Centrale Européenne.

PEPP : Programme d’achats d’urgence pandémique, plan d’achats de dettes sur les marchés visant à faire baisser les coûts de financement des États, des entreprises et des ménages.

TLTRO : les « Long term refinancing operations », généralement appelées LTRO, sont des prêts à long terme (trois ans) accordés aux banques par la Banque centrale européenne.

Des signes d’essoufflement de la reprise

Les statistiques économiques publiées ces dernières semaines décrivent une dynamique conjoncturelle moins favorable en fin d’année, dans un contexte de dégradation de la situation épidémique et de renforcement des restrictions sanitaires.

Les créations d’emplois ont nettement ralenti en novembre, passant de +610 000 à +245 000 sur le mois. À ce rythme, il faudrait environ trois ans pour que l’emploi retrouve son niveau de février. Le taux de chômage baisse de 0,2 point sur le mois, à 6,7%, mais l’amélioration est liée à une baisse du taux de participation. On observe également une remontée des inscriptions hebdomadaires au chômage sur les deux premières semaines de décembre.

La consommation des ménages montre elle aussi des signes de ralentissement, les ventes au détail se repliant de 1,1% en novembre. La baisse est généralisée mais elle particulièrement marquée dans le secteur de la restauration où les ventes n’ont pas encore retrouvé leurs niveaux d’avant crise, ce qui n’est pas le cas de la plupart des autres catégories.

Si la consommation montre des signes de faiblesse, les données trimestrielles publiées par la Réserve Fédérale confirment l’impact paradoxal de la crise du Covid-19 : avoir considérablement amélioré la situation des ménages américains. L’ampleur des mesures de soutien mises en place par le gouvernement a permis de faire plus que compenser les pertes de revenus d’activité et les ménages ont en parallèle fortement réduit leur consommation de services du fait des mesures de confinement, leur permettant d’accumuler une épargne très importante.

Si l’on regarde les flux nets, les dépôts des ménages ont augmenté de 1527 Mds USD au cours des deux derniers trimestres quand l’endettement total des ménages a augmenté de seulement 307 Mds USD. L’endettement net des dépôts a donc diminué du montant de 1220 Mds USD, soit l’équivalent d’un mois entier de consommation. En dollars courants3, la dette nette est ainsi au plus bas depuis 1993. Rapportée au revenu disponible, elle est au plus bas depuis 1991.

Cette forte baisse de l’endettement net des ménages américains constitue un facteur très positif pour la reprise de l’activité lorsque les États-Unis sortiront du régime de confinement, une perspective qui se rapproche grâce au début de la campagne de vaccination. D’autant que de nouvelles mesures budgétaires de soutien et de relance s’annoncent. La proposition bipartite prévoit un paquet de 900 milliards de dollars qui comprendrait une bonification des indemnisation chômage, des aides pour les PME et l’envoi de chèques aux ménages américains.

Taux de participation : mesure le pourcentage de la population en âge de travailler qui participe activement au marché du travail, en travaillant ou en cherchant du travail.

Réserve Fédérale : la réserve fédérale des Etats-Unis (Fed), soit la banque centrale des Etats-Unis.

Dollars courants : valeur d’une monnaie à la période courante. L’expression « dollars constants » renvoie aux dollars de plusieurs années exprimés selon leur valeur (« pouvoir d’achat ») au cours d’une année, appelée l’année de base. Par exemple, pour passer d’un dollar courant à un dollar constant, et supprimer l’impact de la variation des prix, le calcul est le suivant : (dollars courants / indice des prix) x 100 = dollars constants.

PME : les petites et moyennes entreprises sont celles qui, d’une part, occupent moins de 250 personnes, d’autre part, ont un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros.

 

Une conjoncture bien orientée

Les statistiques de novembre montrent une poursuite de la reprise économique en Chine. Du côté de l’offre, la production industrielle augmente de +7,0% sur un an, un rythme à peu près stable depuis trois mois et en ligne avec celui qui prévalait avant la forte baisse de février. La production de services poursuit son accélération et progresse de +8,0% sur un an.

Du côté de la demande, les ventes au détail affichent une hausse de +5,0% sur un an, après +4,3% sur un an en octobre. Ce rythme de croissance est inférieur à celui qui prévalait en début d’année mais cela s’explique par un effet prix. En volume, les ventes au détail augmentent de +6,2% sur un an, un rythme plus rapide qu’avant la crise du COVID.

L’investissement continue d’accélérer et augmente de +9,7% sur un an. Alors que le dynamisme observé depuis plusieurs mois s’expliquait en premier lieu par le secteur de l’immobilier, on observe une nette réallocation des dépenses vers le secteur manufacturier (+12,5% sur un an après +3,5% sur un an) sur le mois. L’investissement dans les infrastructures est à peu près stable depuis trois mois (+3,5% sur un an).

Les exportations sont très dynamiques, passant de +11,4% sur un an en octobre à +21,1% sur un an en novembre. Les exportations liées au COVID (masques et instruments médicaux) rebondissent du fait de la dégradation de la situation sanitaire en Europe et aux Etats-Unis au mois de novembre mais elles ne sont pas le principal moteur du rebond des exportations. Les importations sont à peu près stables (+4,5% sur un an), ce qui fait que l’excédent commercial s’accroît pour atteindre un plus haut historique à 75 Mds de dollars.

Les enquêtes PMI envoient des signaux très positifs. La moyenne des PMI NBS et Caixin/Markit passe de 52,5 à 53,5 dans le secteur manufacturier et de 52,5 à 53,5 dans le secteur des services. Elles se situent désormais aux plus hauts depuis 2011.

L’inflation a basculé en territoire négatif en novembre, passant de +0,5% sur un an en octobre à -0,5% sur un an en novembre, un mouvement qui s’explique pour moitié par le ralentissement des prix du porc (-12,5% sur un an contre -2,8% sur un an en octobre). En revanche, l’inflation sous-jacente est stable depuis cinq mois à +0,5% sur un an.

La croissance du crédit a ralenti à +13,6% sur un an en novembre. Il s’agit du premier ralentissement depuis le début de la pandémie, ce qui pourrait indiquer que les autorités commencent à réduire leur soutien, la normalisation de l’activité étant maintenant bien avancée.

PMI : les indices PMI sont des indicateurs de confiance qui synthétisent les résultats des enquêtes menées auprès des directeurs d’achats des entreprises. Une valeur supérieure à 50 indique un sentiment positif dans le secteur concerné. Il se décline en 3 sous indices : Manufacturier, Service ou Composite (qui combine les deux).

NBS : Bureau National de Statistique.

Caixin : indicateur PMI de la vigueur de l’économie chinoise.

 

 

L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 22 décembre 2020 et est susceptible de changer.

 

 

 

Ce document n’a pas de valeur pré-contractuelle ou contractuelle. Il est remis à son destinataire à titre d’information. Les analyses et/ou descriptions contenues dans ce document ne sauraient être interprétées comme des conseils ou recommandations de la part de Lazard Frères Gestion SAS. Ce document ne constitue ni une recommandation d’achat ou de vente, ni une incitation à l’investissement. Ce document est la propriété intellectuelle de Lazard Frères Gestion SAS. LAZARD FRERES GESTION – S.A.S au capital de 14.487.500€ – 352 213 599 RCS Paris 25, RUE DE COURCELLES – 75008 PARIS.